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Haut Mbomou Haut'n line
24 novembre 2010

L’illégalité de la chasse commerciale en question

CiradDans de nombreux pays d’Afrique tropicale humide, la commercialisation de la viande de chasse issue de la faune commune est illégale. Elle constitue pourtant une ressource alimentaire et économique essentielle pour les populations tout en n’ayant pas d’impact flagrant sur la biodiversité de cette faune. C’est ce que met en évidence une récente étude du Cirad menée en République centrafricaine.

Préserver ou conserver, le débat est ancien. De nombreuses études tendent aujourd’hui à montrer que mettre la nature sous cloche n’est pas la panacée en termes de maintien de la biodiversité. Intégrer l’homme dans la nature au travers d’une utilisation raisonnable, d’une exploitation gérée ou encore de l‘écotourisme semble plus profitable. Illustration par les résultats d’une étude sur la pratique de la chasse, menée durant trois ans par le Cirad en République centrafricaine (RCA). La chasse commerciale y est interdite alors que la faune commune – petits et moyens mammifères tels que céphalophes, phacochères ou antilopes - chassée par les villageois supporte très bien la pression de cette activité.

Des situations d’équilibre dynamique

Pour preuve, les chercheurs ont analysé le spectre biologique de l’approvisionnement en viande de brousse de Bangui, la capitale de la RCA. Il met en lumière la proportion des différentes espèces proposées à la vente sur les marchés. Les trois quarts de la biomasse transitant par ces marchés proviennent de la faune sédentaire commune. Cette ressource, constituée d’ongulés petits et moyens, de rongeurs et de suidés, est caractérisée par un taux de reproduction élevé et rapide ainsi que par une durée d’élevage courte par rapport à sa taille. De ce fait, elle résiste bien à une pression de chasse élevée. Les chercheurs ont également intégré dans leur analyse les variations de prix. La venaison boucanée constitue en effet la source de protéine la moins chère, disponible sur les marchés urbains. Ainsi, en théorie, les pressions exercées sur la chasse commune sédentaire par la chasse commerciale aboutissent à des situations d’équilibre dynamique : toute surexploitation entraîne, par raréfaction de la ressource, une augmentation des prix et une diminution corrélative de la consommation, qui se reporte sur d’autres sources de protéines. Dans le cas de Bangui, la théorie est confirmée : sur trois ans, les prix sont restés stables et les prélèvements analysés via le spectre biologique ne varient pas. Enfin, les chercheurs ont enquêté dans les écoles afin de déterminer le nombre de repas contenant de la venaison consommés dans les familles.

Les collectivités, gestionnaires de la ressource

Sur la base de cette analyse, ils proposent la mise en place d’une gestion indicielle : « on ne cherche pas à calculer un nombre d’animaux à abattre, précise Christian Fargeot, de l’unité de recherche Biens et services des écosystèmes tropicaux du Cirad, mais nous développons plutôt un certain nombre d’indicateurs sur les tendances dynamiques des populations. » Par ailleurs, pour les experts, si la faune est la propriété de l’Etat, sa gestion doit être déléguée aux villages. « C’est un enjeu très fort », souligne le chercheur. Les résultats permettent ainsi de proposer aux chasseurs villageois des instruments simples de suivi de la faune commune sédentaire (rendement de l’effort de chasse, spectre biologique des prélèvements). Ils sont alors à même d’assurer eux-mêmes une régulation sociale de la pression de chasse, selon l’évolution des indices. Ils peuvent moduler par exemple le nombre de pièges posés en forêt, le nombre de cartouches pouvant être amenées par sortie ou la répartition de ces sorties dans le temps.

Cependant, cette pression sociale ne pourra être effective que si la collectivité peut contrôler l’accès à son territoire et, également, la commercialisation de la venaison, ce qui suppose une organisation locale des marchés. Il serait ainsi possible d'envisager une véritable gestion durable de cette ressource à condition que l'État accepte d'officialiser les territoires de chasse villageois et de confier la gestion de la faune commune sédentaire aux collectivités locales, en échange du respect de la faune protégée.

Sources: CIRAD - 06/05/2010

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